Ecrire. C'est faire comme mon parrain. Ecrivain.
Ecrire c'est s'isoler. Ecrire c'est rêver. Ecrire c'est le pain du pauvre.
Je n'ai jamais brillé, et tant mieux.
Ecrire, c'est écrire des rêves qui coulent sous les doigts.
Soyons franc. J'essaie d'écrire un roman mais je ne sais pas comment je m'y prends... Je n'y crois déjà plus.
Je cède souvent à la facilité.
Ce qui est important, c'est la vie qui nous entoure. Moi je suis beaucoup dans la vie du dedans.
Je n'observe pas assez les autres. Je ne m'en donne peut-être pas suffisamment le droit. J'écris sur la pointe des pieds.
Comme on voudrait exister, un tout petit peu plus que soi.
Je devrais aussi écrire à ma tante F que je l'aime et qu'elle compte pour moi. Et lui demander pardon si je l'ai blessée en quoi que ce soit.
L'écriture surgit de ce type d'errances-là. De ces peurs qui vous prennent parfois et qui ne se calculent pas.
J'écris comme on rame, et qu'on s'échine à ramer, seule dans une barque.
J'écris car c'est mon véhicule, c'est à dire mon moyen et puis c'est aussi mon but. C'est mon moyen pour atteindre mon but mais en utilisant ce moyen, je l'atteins, ce but.
J'écris pour ne pas être seule. Pour me croire une continuation.
On n'a jamais cru en moi.
J'ai dû me battre pour me faire ma place.
Seul mon parrain a commencé, un jour, à m'encourager.
Mais même à l'époque où il ne croyait pas en moi, je me battais déjà en écrivant.
Ecrire, c'est comme retrouver une soeur.
Je ne triche pas, là. Je ne fais aucun effet.
J'écris parce que ça me fait rêver.
J'écris parce que c'est une solitude exigeante, et j'aime ça: la solitude et l'exigence. Oui, j'aime travailler, c'est du travail de trouver le mot juste, ça demande de la concentration, et du lâcher-prise aussi.
J'écris pour retrouver cette joie de mes dix ans de recevoir une carte de réponse de mon parrain, lui qui était d'ailleurs, hors de ma famille et qui y appartenait pourtant tellement. Lui, mon parrain écrivain (et ça rimait) et dont j'étais si fière. Il m'avait répondu à ma petite carte par une carte affectueuse avec un chat dessus, couleurs: noir, blanc et rouge.
Tout y était. Et l'affection aussi. Je crois qu'il évoquait un feu de cheminée. Même la chaleur était présente. Ses mots chaleureux. A mon parrain écrivain.
J'écris pour retrouver mon parrain écrivain et son amour gratuit.
J'écris pour me protéger.
Et je ne sais toujours pas pourquoi j'écris.
J'écris pour m'imaginer autre. Pour me trouver. C'est le seul moyen que j'ai découvert pour tamiser mes émotions.
J'ai appris à canaliser les mots puis les dire à petites becquées.
J'ai appris à me dire, tout dire, grâce aux mots, et il faut bien s'écouter pour cela.
J'apprends la musique, j'apprends le rythme, je lâche les chiens. Je me dévoile tout en ne disant rien. Tout dépend de l'angle. Je joue à cache-cache. Je dis mon coeur qui est dans mes tripes. Il faut que je freine un peu plus, j'ai un problème de réglage. Oui, il faut que je freine un peu plus, c'est comme une mélodie, il faut bien composer. Il faut une harmonie.
J'écris car cela donne un sens à ma vie.
J'écris pour m'aimer.
Ce soir, je dis les mots comme je les ressens. Pauvres et sans fard.
J'écris pour me dire. Les mots créent un pont entre les autres et moi, l'hyper-émotive.
J'écris pour trouver mes limites, j'écris pour trouver un réceptacle.
J'écris et depuis que j'écris, j'ai des amis qui me comprennent et que je comprends. Des amis qui aiment rêver, lire, voyager ainsi, et s'exprimer (en ramant dans une barque, comme moi).
J'écris pour aimer.